Le thème de la 7ème Assemblée plénière de la Conférence des Églises du Pacifique qui se tiendra à Arue (Tahiti) du 3 au 13 mars 1997 est "Reaffirming God hope of the fenua", soit "réaffirmer Dieu espérance de la Terre" ou mieux "Renouveler son adhésion à Dieu espoir de la Terre".
Jésus a été Il en tout semblable aux hommes ... se comportant comme un homme" [44]. Il a donc partagé notre vie; a satisfait aux besoins de santé de beaucoup de pauvres, de nourriture de la foule, d'équilibre de beaucoup de gens possédés, et son message de justice, de paix, de fraternité nia perdu en rien de sa vigueur. C'est le climat le plus constant que lion retrouve à chaque page de l'Évangile, et à toutes les époques.
Son message dépasse notre vie terrestre mais c'est aussi un message pour toute la vie. En dernier ressort Jésus nous fait entrer dans son Royaume sans nous faire sortir de notre existence humaine, familiale, sociale, économique, politique.
"Entre évangélisation et promotion humaine - développement libération - il Y a en effet des liens profonds" [45]. L'attente de l'éternité, le chrétien la vit en même temps que le souci du temps présent.
2-2-1 - Evangéliser la désespérance des hommes
La civilisation de consommation a entraîné avec elle une permissivité qui semble ne plus avoir de limites et nous ne pouvons pas dire que nous l'avons combattu en Polynésie Française ; nous l'avons subie, et même parfois nous avons pactisé avec elle : la famille tant sur le plan économique que sur le plan moral en est la principale victime - certains jeunes disent ne plus rien attendre, ni de leurs proches, ni de la société, ni de l'Église, souvent parce qu'ils sont sans travail et ont subi auparavant toutes sortes d'autres épreuves.
Les mêmes dangers pèsent sur l'ensemble des populations des îles l'éducation sexuelle ne siest pas faite, on est tombé dans le sexualisme ; les naissances diminuent, mais au prix de combien d'avortements ? des enfants menacés sont recueillis par de nouvelles institutions, mais au sein même de leurs familles ils sont toujours violentés ; on applaudit à la renaissance de la culture polynésienne, mais voici que lion reprend des incantations païennes et la publicité révèle une recrudescence de la superstitution. Le tahua est détrôné par le devin. Le sens de la prière se perd car la religiosité a pris la place de la Foi.
Cependant et de par le Monde ou ici même de nouvelles valeurs apparaissent ou réapparaissent: la solidarité, le partage, la paix, le dialogue, le respect de l'homme, de l'enfant de ses droits, la communication, le développement, l'écologie... etc. L'Évangile nous donne un enseignement explicite sur ces valeurs. Tout chrétien doit contribuer à les promouvoir. Toutes les cultures recèlent aussi les traces de ces valeurs, car elles sortent des profondeurs de l'Homme. Dans un milieu plu ri-culturel, comme l'est la Polynésie chacun peut hâter l'application de ces valeurs. Au sein de notre monde polynésien, ce serait un beau défi à lancer.
Toutes ces valeurs, dans la mesure où elles prévaudront peu à peu, en Polynésie Française, sont des antidotes puissantes à l'égoïsme social, à l'immoralité, au culte de l'argent, au mépris de la vie. Elles peuvent remettre l'homme debout ; les jeunes sont sensibles à ces valeurs... si ces valeurs deviennent consistantes elles seront les premiers signes de cette "civilisation de l'Amour" vers laquelle les Pape et beaucoup de croyants veulent entraîner le Monde à l'occasion du 3ème millénaire qui va s'ouvrir.
2-2-2 - L'Éducation - La Formation
Les chrétiens n'ont guère de prise sur une société sécularisée. Il y a une manière de ré-affirmer Dieu qui n'est pas celle que Jésus-Christ a choisie et qu'll a conseillée à ses apôtres. "Soyons grain de sénevé", "Ievain dans la pâte" avec patience, mais aussi avec la vigueur des convictions intérieures qu'aucun échec n'arrêtera.
Le dernier Synode diocésain de 1989, par la voix de son Secrétaire Général nous entraînait "vers une culture de responsabilité". L'Éducation, la
Formation sont faites pour cela. Notre diocèse, héritier du Vicariat Apostolique a toujours proposé aux familles comme l'un des premiers objectifs de vie chrétienne "l'éducation".
Donnons-nous la main pour que les enfants, les jeunes ne soient pas privés ni d'éducation ni de formation. La liberté qu'ils revendiquent n'est parfois pas conciliable avec l'obligation que les parents et adultes ont à leur égard.
Car l'éducation chrétienne comporte un message qui doit être explicite: en ce qui concerne la foi, en famille, en paroisse ou dans nos écoles catholiques l'enfant puis le jeune doit bénéficier non seulement d'un éveil de la Foi, mais d'une complète initiation à la vie chrétienne. Brisons cette mentalité qui a des effets désastreux sur la foi des jeunes, et par laquelle certains considèrent qu'après la Confirmation, tout s'arrête ou même que le catéchisme est facultatif.
Le dimanche est fait pour l'homme : toute l'éducation des loisirs au sein de la famille et dans la société reste à faire. Quand le dimanche disparaît de l'existence d'un homme il perd la trace de son propre bonheur et de Dieu.
Au catéchisme, puis après, à l'occasion des grandes questions que les jeunes et adultes se posent, ni les commandements de Dieu, ni la morale chrétienne ne doivent être oubliés. Il convient, avec la pédagogie appropriée, que sur la sexualité, la vie, le mariage, l'enseignement de l'Eglise soit intégralement transmis. On le trouve dans le Catéchisme de l'Église Catholique qui doit être la source habituelle du "catéchiste".
Mais pour que ne soit pas dissociée la morale personnelle et la morale sociale c'est toute une vision de l'homme qu'il faut déployer. Une réflexion, un échange sur les problèmes de l'heure devraient être suivis de la découverte des documents de l'Église sur le Développement, l'Homme, le Travail, .. etc.
Le sens du travail mérite attention. Le travail n'est ni une punition [46], ni seulement un bien économique. L'homme souffre plus de ne pas savoir travailler, de ne pas aimer le travail, de ne pas avoir de travail, que de travailler. Le travail est insertion dans la création et dans la vie de son pays. Le travail doit fairevivre l'homme ; il ne peut s'apprécier en terme de Il production". Le jour est arrivé où ce ne sont plus les richesses que lion a à partager mais le travail lui-même. L'égalité dans le travail et sa rémunération sur l'ensemble de la Polynésie est un des plus gros chantiers à mettre en œuvre. Il y a trop de disparités selon les secteurs.
Par dessus tout l'engagement des jeunes dans des activités, un apostolat de leur choix, doit être encouragé et privilégié. Une formation peut être donnée dans des institutions diverses, mais ne remplacera jamais l'expérience que le jeune peut acquérir au milieu d'autres jeunes où concrètement il pourra vivre selon ses convictions et se décider avec le sens de la responsabilité qu'il acquerra.
C'est déjà, je le sais, ce qui se fait ou que lion cherche à faire. Malgré l'attention continue que cela demande, le diocèse doit beaucoup investir dans la formation. Ce sont les mouvements, les associations, les groupes de prière qui sans cesse doivent faire le bilan de leurs activités pour évaluer les fruits de la formation.
En tout cas plus que jamais donnons-nous la main pour que tous nous soyons encouragés d'un bout à l'autre de la filière éducation-formation, par les initiatives, la persévérance des uns et des autres.
Qui dit éducation, formation dit accompagnement. Croyons aux vertus du dialogue, possible même entre jeunes et adultes, croyons aux bienfaits de la présence, du témoignage, de l'écoute.
C'est ce qui forme le levain, ce qui est graine souvent invisible que le Seigneur nous demande de semer abondamment.