Il y a quelques années, l'Église a dû rappeler dans la déclaration "Dominus Jesus" qu'il n'y a qu'un seul sauveur. En effet certains théologiens avaient émis l'hypothèse que Dieu a envoyé à plusieurs reprises dans l'Histoire du monde des sauveurs et que Jésus-Christ n'est que l'un d'eux. En conséquence, on pouvait être sauvé en suivant au choix l'un de ces sauveurs. Le Christ était ainsi mis sur un pied d'égalité avec un certain nombre de grands personnages religieux tels que Bouddha.
En Polynésie, certains intellectuels ont entrepris de restaurer le culte des anciens dieux. Cela se situe dans une recherche d'un mode de vie plus conforme à la culture maohi. Cependant, il n'est pas possible aujourd'hui de restaurer intégralement l'ancien culte, qui comportait des actes barbares comme les sacrifices humains ; aussi le néo paganisme qui nous est proposé est tout a fait édulcoré par rapport au culte des anciens dieux tel qu'il se pratiquait avant l'arrivée des Européens et bien qu'il s'en défende, il est influencé par le christianisme.
D'autres, sans vouloir substituer un culte ancien rénové au christianisme, empruntent à ce culte un vocabulaire pour habiller leur foi chrétienne. On appelle Dieu : "Te Tumu" ; on traduit le mot "créer" par "rahu" sans se soucier de la différence entre un concept qui signifie "faire de rien" et un autre qui signifie "accomplir par magie".
Notre attitude à l'égard du culte qui a été pratiqué par nos ancêtres doit être le respect car, malgré ses déficiences, il a constitué une pierre d'attente jusqu'à ce que la Révélation parvienne jusqu'à nos rivages. D'autre part si les Polynésiens d'aujourd'hui ont une mentalité religieuse, c'est qu'ils héritent d'une culture religieuse qui a été entretenue par l'adoration qui était pratiquée sur les "marae".
Cependant, les premiers convertis au christianisme, issus pour la plupart du milieu sacerdotal ou des "arioi", ont bien vu les insuffisances d'une religion fondée sur la peur plutôt que sur l'amour. Lorsque le grand prêtre Patii a brisé ses idoles sur le marae de Papetoai en 1813, il a voulu faire un geste fort pour bien marquer que les dieux qu'il avait adorés jusqu'alors étaient des dieux morts, incapables d'apporter le salut.
La religion n'est pas une affaire de snobisme. Le croyant est à la recherche de la vérité, une vérité qui rend libre et qui sauve. Aussi, malgré tout le respect et l'intérêt que nous devons avoir pour le culte de nos ancêtres, nous ne pouvons y rechercher quelque chose qui viendrait s'ajouter ou compléter notre foi chrétienne.
Les religions et les sagesses orientales exercent un attrait sur certains de nos contemporains nés dans le christianisme, d'où la tentation de rechercher dans ces sagesses une sorte de complément à la foi chrétienne. Nous pouvons admirer ces sagesses et reconnaître tout ce qu'elles apportent aux peuples qui se sont nourris de ces sagesses, admirer certaines personnalités représentatives de ces sagesses comme le Dallai Lama. Mais on ne peut être à la fois Chrétien et Bouddhiste. Dans le christianisme, nous avons affaire à un Dieu personnel qui nous apporte le salut par sa grâce et le salut est une communion à sa plénitude. Dans le bouddhisme, il n'y a pas de Dieu personnel et le salut est obtenu par les efforts accomplis par chaque personne et se trouve dans le non-être.
Il fut un temps où beaucoup de chrétiens se voulaient aussi marxistes et la pensée marxiste a inspiré des intellectuels abusés par la propagande communiste. Ce fut le cas, en particulier des "théologies de libération" qui ont fleuri en Amérique du Sud. On pensait qu'avant de proposer aux couches les plus pauvres de la population la doctrine chrétienne, il fallait d'abord les aider à faire la révolution, à briser l'injustice dont ils étaient victimes. Un des résultats de cette aberration a été qu'une partie des masses populaires se sont tournées vers les sectes qui au moins leur parlaient de Jésus. Mais la perversité du marxisme et tous les crimes qu'il a inspirés ont fini par ouvrir les yeux même des intellectuels les plus aveugles et cette mode est en voie de forte régression.
Mais la déviation la plus répandue c'est de vouloir être Chrétien tout en faisant une part à l'esprit du monde. Si l'on rencontre beaucoup de gens qui, tout en se disant Chrétiens, sont imprégnés de New Age, de bouddhisme ou d'autres spiritualités orientales, on rencontre surtout des gens qui font une part dans leur vie à ce qui est du "monde" tout en acceptant quelques valeurs chrétiennes. Ces gens-là ne sont pas disciples de Jésus et ne sont pas dans la vérité de Jésus. Jésus "vomit les tièdes" (Apo 3,16), c'est-à-dire les gens qui le suivent à moitié. La sagesse du monde et la sagesse de Jésus ne sont pas compatibles : "C'est bien une sagesse que nous enseignons aux Chrétiens confirmés mais ce n'est pas la sagesse de ce monde" (1 Co 2,6).