Mardi 22 décembre, l’Ordre de Malte organisait son repas bi-mensuel au presbytère de la Cathédrale pour nos amis de la rue. Comme chaque année, le dernier repas de l’année revêt un caractère festif ou les convives sont servis à table. Il y a deux mois, ce sont les étudiants de l’École de Commerce de Tahiti qui avaient pris en charge l’intégralité de ce repas. Suite à cela, les étudiants, ont chacun écrit ce qu’ils avaient vécus et dans quel état d’esprit ils l’avaient fait. Voici le compte-rendu de Teanivai Putua… un Noël véritable !
En Polynésie Française, la situation est alarmante, le nombre de SDF aurait été multiplié par dix en 20 ans. Parmi les sans domicile fixe, toutes les tranches d'âge sont représentées, des mineurs aux séniors. En 2015, on compte 400 personnes sans domicile fixe qui vivent dans la rue. Une situation qui va de mal en pis. Nelson Mandela disait « La pauvreté n’est pas un accident, comme l’esclavage et l’apartheid, elle a été faite par l’homme et peut être supprimée par des actions communes de l’humanité ». Le 28 octobre dernier, les étudiants de deuxième année de l’École de Commerce de Tahiti ont réalisé une action commune : nourrir les SDF de Papeete. À travers ce compte rendu, je vais expliquer pourquoi j’ai participé à cette action et ce qui m’a beaucoup touché lors de cette soirée.
Le 28 octobre dernier, j’ai eu la possibilité de participer à une action digne d’un citoyen : nourrir les SDF de la rue. Vaincre la pauvreté est, pour moi, non pas un acte de charité, mais un acte de justice. En tant que citoyen Français, je veux limiter la pauvreté, sans pour autant limiter la richesse. La France est le pays des droits de l‘homme, pourtant, en Polynésie française, la pauvreté touche beaucoup de personnes. Selon l’ISPF, 28,2% de la population vivent sous le seuil de pauvreté, avec moins 42 950 xpf par mois. Selon le collectif Te Ta’i Vevo, 400 personnes vivent dans la rue. Là où des hommes sont condamnés à vivre dans la misère, les droits de l’homme sont violés. Depuis des années, les SDF ont beau dormir tous les soirs dans des papiers journaux, mais n’ont jamais fait l’actualité. Aujourd’hui, aider mon prochain est pour moi un devoir. Ce sont nos citoyens, nos frères, nos compatriotes, nos égaux, notre race humaine, nos semblables qui sont dans la rue et nous ne pouvons rester indifférent face à la situation dans laquelle ils vivent. D’ailleurs Einstein disait : « Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire ». Vivre est la chose la plus rare au monde. La plupart des gens ne font qu’exister. Moi, je veux donner un sens à mon existence. J’ai la volonté d’accompagner et soutenir tous ceux qui sont dans l’exclusion totale, l’errance et la perte de dignité. Tout le monde a le droit à la dignité. Énormément de situations m’ont touché lors de cette action. Pendant cette soirée, je me suis rendu compte que la pauvreté touche tous les âges : les mineurs, les jeunes majeurs (18-25 ans) et les personnes âgées. Beaucoup de ces personnes ont perdu l’espoir, vivent dans l’alcool et la drogue. Mais ce qui m’a beaucoup touché, c’est le sourire sur le visage de certains SDF malgré la pauvreté dans laquelle ils vivent. Ils n’attendent pas d’être heureux pour sourire mais ils sourient plutôt afin d’être heureux.
Pour conclure, la situation des SDF en Polynésie Française s’est dégradée en l’espace de 20 ans. Cette action m’a beaucoup enrichi intérieurement. J’ai compris qu’après le verbe « aimer », le verbe « aider » est le plus beau verbe au monde. Un homme n’est jamais aussi grand que lorsqu’il se penche pour aider son prochain. Je voudrai terminer sur cette citation de Mère Teresa « À notre époque de progrès, tout le monde est pressé, personne n’a le temps, et les malheureux incapables de rivaliser s’effondrent. Ce sont eux que nous voulons aimer, servir, entourer. Savoir se contenter de ce que l’on a : Ça, c’est être riche ».
© Teanivai Putua - 2015