A. 1ère année (1977-1978) : l'insertion
1. La première équipe.
Une fois la décision prise par la Province Saint-Jean-Baptiste d'établir une mission oblate à Tahiti, il fallait trouver le personnel nécessaire. C'est ainsi qu'un appel fut lancé dans la Province et dans l'ensemble de la Congrégation.
Dans la Province Saint-Jean-Baptiste, les Pères Jules Guy (54 ans) et Daniel Nassaney (29 ans) se sont portés volontaires. Personnellement, c'est à mon retour en France, après 21 ans au Laos, que j'ai eu connaissance de la demande de la Province franco-américaine qui m'accueillit en son sein lorsque je proposai ma collaboration. J'avais 50 ans. Je suis arrivé aux États-Unis début juillet 1977 pour faire la connaissance de mes nouveaux confrères.
Plusieurs fois nous nous sommes retrouvés partageant nos expériences et nos idées sur la manière dont nous comptions vivre et travailler à Tahiti. Il nous paraissait évident de vivre en communauté, d'avoir un temps de préparation - un an si possible - pour apprendre la langue, nous familiariser avec la culture, découvrir la pastorale du diocèse, avant d'envisager une quelconque prise en charge de ministère dans la ligne de ce qui nous était demandé.
La date du départ de Los Angeles pour Tahiti fut fixée au dimanche 28 août 1977.
2. Installation sur place - Prise de contact
Prévus pour débarquer à l'aéroport de Faaa le matin du 29 août à 5h30, nous y sommes arrivés avec plus de 19 heures de retard. À cause de ce retard, nombre de chrétiens et de membres des paroisses et des communautés religieuses de Papeete n'ont pu venir nous couronner - il faudrait plutôt dire nous couvrir de fleurs -. Cependant, Mgr Michel Coppenrath et plusieurs membres de la Mission catholique avaient tout de même tenu à être présents.
Nous avons logé dans un bâtiment annexe de l'évêché de Papeete. Cette proximité avec Mgr Michel nous a permis de faire réciproquement connaissance et de rencontrer déjà d'autres membres du personnel de la Mission. La première semaine s'est passée en visites de la ville de Papeete et de ses environs.
Le dimanche 4 septembre, au cours d'une réception officielle à l'église Maria no te Hau (Notre-Dame de Paix), nous avons expérimenté l'accueil polynésien : chants, colliers de fleurs ou de coquillages, démonstrations de respect et d'affection de la part des fidèles pour les prêtres et les missionnaires que nous étions. En cette circonstance, nous avons été impressionnés par l'entente fraternelle régnant entre les Pères, les Frères, les Sœurs et les chrétiens.
À cette époque, quelles étaient les forces vives de la Mission ? Il y avait Mgr Michel Coppenrath, originaire de Tahiti, son frère prêtre Hubert, et 3 prêtres diocésains ; 2 prêtres Fidei donum ; 24 pères et 1 frère Picpuciens (SSCC). Les Congrégations religieuses présentes étaient : les Frères de l'Instruction Chrétienne, de Ploërmel (FIC) ; les Filles de Jésus Sauveur (FJS), une congrégation fondée par Mgr Paul Maze (SSCC), prédécesseur de Mgr Michel ; les Sœurs de Saint-Joseph de Cluny (SJC) ; les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame des Anges, venues du Canada (MNDA) ; les Filles de la Charité du Sacré-Cœur de Jésus (FCSCJ), aussi du Canada ; les Sœurs du Bon-Pasteur, irlandaises. Il était évident que la quasi totalité des forces vives du diocèse était d'origine étrangère et non polynésienne.
Durant cette première semaine, Mgr Michel a clairement exprimé son vif désir de nous voir apprendre le tahitien, principale langue de la Polynésie Française, ce qui rejoignait notre propre volonté. Pour ce faire, il a stipulé que pour un an nous resterions logés à l'annexe de l'évêché. Tous les jours, le P. Hubert Coppenrath, membre de l'Académie tahitienne, nous donnerait une heure de cours ; il fut décidé ensuite que nous n'aurions aucun engagement pastoral sur l'île de Tahiti durant cette année d'initiation. Nous avions ainsi la possibilité de connaître les différentes paroisses, communautés religieuses, les œuvres du diocèse : écoles, collèges, foyers d'accueil, services de catéchèse et d'information tel que radio, presse, librairie.
Mgr Michel exprima également le souhait de voir le P. Patrice Morel l'accompagner dans sa tournée pastorale dans les îles éloignées de l'Est des Tuamotu (un des archipels de la Polynésie), et cela dès le 7 septembre[5]. « Cette tournée pastorale devait durer environ trois semaines. Par suite du naufrage de la goélette Aranui sur le récif de Marutea-Sud (le plus au sud des atolls des Tuamotu), les naufragés, par les soins de la marine et de l'aviation militaires, se sont retrouvés à Tahiti le 19 septembre. »[6]
3. Apprentissage
... de la langue
Le tahitien est une langue qui n'a aucun point commun avec les langues européennes ou asiatiques. Elle ne possédait aucune écriture jusqu'à l'arrivée en 1797 des missionnaires protestants de Londres qui s'attelèrent à la traduction de la Bible en tahitien. Grâce à ces pionniers, il a été possible par la suite de composer des livres, de codifier la langue, de créer un patrimoine de légendes et de récits historiques.
Deux caractéristiques de cette langue n'en facilitent pas l'apprentissage. La première : l'alphabet tahitien ne comporte que 5 voyelles et 9 consonnes. La deuxième : l'absence des verbes « être » et « avoir », ce qui oblige à des tournures particulières pour exprimer l'attribution et la possession. Nous nous sommes donc mis à l'école avec le P. Hubert Coppenrath pour la théorie. Quant à la pratique, ce sont nos rencontres quotidiennes avec la population qui nous servaient de laboratoire. Mais il n'y a rien de tel qu'une immersion à temps plein dans la masse pour progresser. Aussi avons-nous été envoyés dans des communautés chrétiennes éloignées, sans prêtre, pour continuer notre apprentissage linguistique et assurer une présence sacerdotale pour le temps de Noël, du 9 décembre 1977 au 27 janvier 1978[7].
Ce séjour de sept semaines nous a été très profitable du point de vue linguistique. Nous étions bien obligés d'utiliser le tahitien pour le ministère: sacrements, réunions avec les paroissiens, visites des familles. Après ce temps hors de Tahiti, nous commencions à être plus à l'aise dans nos rencontres avec les Tahitiens. Mais nous avions encore d'énormes progrès à accomplir. Une année pour maîtriser une nouvelle langue totalement différente de sa langue maternelle n'est pas de trop.
... de la culture polynésienne.
Une constatation unanime : ces gens et particulièrement ces chrétiens sont très attachés à leur religion, et la présence d'un prêtre au milieu d'eux est une bénédiction, à tel point qu'ils disent : « Lorsque le Père s'en va, Dieu s'en va ».
Les Tahitiens sont très affectueux et de tempérament très émotif. Dans leur vie, le « sentiment » nous semble plus important que la raison. Lorsque la relation entre deux personnes est bonne, qu'il n'y a pas de divergence d'idées, tout va bien. Si une difficulté se présente, s'il y a heurt entre deux caractères, très souvent c'est la dispute, voire les coups et la séparation. Cette première impression nous questionnait par rapport à l'engagement des Tahitiens pour la vocation sacerdotale. C'était sans doute aussi à cause de ce caractère que les Polynésiens hésitaient à se marier. Ils considéraient le mariage comme « sacré ». Donc, être infidèle, c'était enfreindre un « tapu »[8] (interdit) et mériter un châtiment divin, encourir une malédiction.
Dans la culture polynésienne, le « tapu » était un interdit que le roi d'une île, ou d'un secteur, mettait sur tel terrain, tel arbre, pour s'en réserver l'usage. Aller contre cette réservation rendait passible de la peine de mort. Cette notion d'interdit social a été transposée au plan spirituel et donc le péché, considéré comme une infraction contre une loi divine, engendrait la malédiction céleste : maladie, mort personnelle ou d'un proche, ou tout autre malheur.
Il faut reconnaître, je crois, que d'une manière générale, à la fin du 18e s. et au début du 19e s., l'évangélisation protestante et catholique mettait surtout l'accent sur la morale, sur les commandements : ce qu'il fallait observer, ce qu'il était interdit de faire, de dire, de penser. Cette manière de présenter la foi chrétienne rejoignait et confortait la mentalité païenne craintive des Polynésiens. Il faudra des décennies pour essayer de faire évoluer les mentalités et les comportements.
Nos échanges, dès les États-Unis, avaient révélé et renforcé une vision commune de notre mission : aider les personnes vers qui nous serions envoyés à devenir adultes dans la foi, à être leurs propres évangélisateurs, à ne pas être passivement dociles. Une réflexion que tous les trois nous avons entendu et que nous entendrons encore bien des fois à Tahiti : « Père, dites-nous ce qu'il faut faire… » Tous les trois nous avons essayé de faire comprendre aux gens qu'ils avaient une intelligence, une capacité de jugement, qu'ils avaient reçu l'Esprit Saint, et donc qu'ils étaient à même d'émettre un avis, que le Père n'était pas là pour leur imposer ses vues, ses idées, mais pour les aider à connaître et aimer Jésus-Christ et à vivre chrétiennement selon leur propre culture.
Ainsi, une question pratique est apparue. Les Polynésiens aiment chanter lorsqu'ils se rassemblent et ils s'accompagnent de guitares ou de « oukoulélés ». Alors nous leur avons proposé d'utiliser ces instruments à l'église. Ce fut un cri unanime de réprobation : « Oh non ! Père, c'est péché. » - « Pourquoi ? » - avons-nous demandé. « Parce que les Pères l'interdisent. » La raison est qu'on associait l'usage de ces instruments avec des chansons plus ou moins lestes chantées lors des bringues, des repas populaires. Il a fallu expliquer que par eux-mêmes ces instruments sont neutres, ni bons, ni mauvais. Tout dépendait de l'usage que l'on en faisait. De même qu'un tipi (coupe-coupe, machette) est très utile pour l'usage domestique, la récolte du coprah, il peut devenir aussi un outil de meurtre. Peu à peu les mentalités ont changé et maintenant, guitares, oukoulélés ou autres instruments accompagnent les cérémonies religieuses.
... du problème des vocations.
Autre point qui nous préoccupait : l'urgence de la formation chrétienne des Polynésiens. Dépasser le catéchisme appris par cœur pour la préparation à la première communion et à la confirmation, et puis, plus rien ou presque. Déjà dans le diocèse, à notre arrivée, des moyens fonctionnaient pour cette éducation : radio, presse, réunions bibliques, école de formation des « katekita »[9]. Par rapport au sacerdoce une réflexion revenait souvent : « La prêtrise, ce n'est pas pour nous Polynésiens. Le célibat n'est pas pour nous. » Et pourtant, depuis le début de la Mission, les Pères de Picpus, sous l'impulsion des évêques de la même Congrégation, avaient eu le souci d'assurer une relève recrutée sur place.
Entre 1851 et 1891, plusieurs tentatives d'ouverture d'un Petit Séminaire (ou École apostolique) avaient échoué. Ce n'est qu'en 1940 qu'un nouvel essai aboutira et fonctionnera jusqu'à ce jour. Il accueille des garçons de la sixième à la troisième (système scolaire français), soit des enfants de 11/12 ans à 15/16 ans. Ces jeunes suivent leur scolarité à l'École du Sacré-Cœur sise à Taravao (Tahiti). Prolongeant le Petit Séminaire pour un discernement vocationnel, le Foyer Jean XXIII a été ouvert suite à la présence d'un prêtre Fidei donum, l'abbé Paul Cochard qui, en 1972, mit sur place le centre diocésain de la catéchèse. Ce Foyer comptait cinq jeunes lorsque nous sommes arrivés à Tahiti. Ils poursuivaient leur scolarité dans différentes institutions de Papeete. Le P. Stanilas Mioduski, SSCC, en avait la responsabilité ainsi que celle de deux séminaristes envoyés au Grand Séminaire interdiocésain de Suva (Fidji).
Notre séjour dans les îles, la présence des cinq jeunes du Foyer Jean XXIII, nous ont rendu plus attentifs et plus décidés que jamais pour la formation d'une Église locale se suffisant à elle-même. Plus vite que prévu, nous allons être engagés dans l'action. Le lendemain du retour des PP. Jules et Patrice, le P. Stanislas, en charge du Foyer Jean XXIII quitte la Polynésie pour des raisons de santé et son retour est plus que problématique. Aussi, dès que le P. Daniel revient des Îles Australes, Mgr Michel lui demande de prendre soin du Foyer Jean XXIII. Cette prise en charge l'empêchera de retourner dans les Îles pour Pâques. Par contre, le P. Jules visitera Rangiroa et les atolls voisins, Tikehau et Manihi, pour dix semaines. Dans la même période de temps, le P. Patrice se rendra de nouveau à Takapoto, et aussi à Takaroa, Apataki et Arutua.
À son retour de Rangiroa, le P. Jules écrivait dans Le Semeur Tahitien (journal de l'archidiocèse) :
« Mon retour dans les îles au temps de Pâques ne fut pas un sacrifice, mais plutôt une joie. L'accueil des fidèles ne fut pas celui d'un étranger qui arrive ou d'un Père qui vient parmi eux pour la première fois, mais celui d'un père qui retourne à la maison, qui est revenu à sa famille. Aussi la première question fut : “Allez-vous demeurer avec nous maintenant ?” C'est avec chagrin que je leur dis que je serai parmi eux pour 10 semaines seulement. “Père, nous sommes au moins 400 fidèles sur l'île (Rangiroa), il nous faut un prêtre” Il fallait leur répondre que les prêtres n'étaient pas assez nombreux ; qu'il faut prier beaucoup pour des vocations polynésiennes ; qu'il faut que les parents transmettent aux jeunes cette vérité que Dieu et l'Église ont besoin d'eux pour la formation de l'Église en Polynésie. C'est tout à fait inconcevable que Dieu n'appelle pas certains jeunes d'ici pour le servir comme prêtres, religieux et religieuses. Dans les nombreux foyers chrétiens, il y a des jeunes qui entendent cet appel ou bien qui l'entendraient si les parents parlaient de la grande grâce qu'est cet appel de Dieu, et si les parents parlaient de la grande nécessité de l'Église polynésienne d'avoir ses prêtres, ses religieux, ses religieuses. C'est Mgr Michel Coppenrath qui disait qu'aussi longtemps que l'Église de Polynésie n'aura pas ses propres prêtres et ses propres religieux, l'Église ne sera pas véritablement implantée. Mais, si au sein de la famille, il n'y a jamais mention de la beauté et de la grandeur, et de la nécessité de ces vies consacrées à Dieu, comment peuvent-ils entendre cet appel à l'intérieur d'eux-mêmes ? »
Nous sommes déjà fin mai lorsque les trois Oblats se retrouvent à Tahiti. Il est temps de penser à l'avenir et à notre insertion dans la pastorale de l'archidiocèse.
4. Ligne d'action pour le futur.
Dans une circulaire envoyée aux parents et amis à la mi-août 1978, le P. Daniel présente très bien la situation.
« Nous avons eu une bonne dose d'expériences ministérielles. Nous avons assuré le ministère ordinaire dans les paroisses locales, célébré la messe, entendu les confessions, baptisé, béni des mariages. Nous avons enseigné la religion aussi bien dans des écoles que dans des paroisses. Nous avons pris part à la préparation des premières communions et des confirmations. Nous avons participé à des processions, des bénédictions, des pèlerinages, des “matutu” (soirées religieuses de chants, de prières et d'enseignement dans le cadre des paroisses).
La troisième partie de notre contrat était de n'accepter aucun ministère permanent. Nous avons fait une exception, du moins en mon cas. J'ai dû remplacer le P. Stanislas comme directeur du Foyer Jean XXIII et président du comité des vocations... Alors que graduellement nous entrions dans la vie et les activités de l'archidiocèse, d'autres événements, spécialement la santé du clergé agissaient contre nous. En l'espace de 12 mois depuis notre arrivée, la condition du clergé s'est graduellement détériorée malgré notre nouvelle présence. En plus du P. Stanislas dont nous n'avons aucune nouvelle, beaucoup d'autres pères sont malades et leur participation future dans le ministère à Tahiti n'est pas trop prometteuse. À présent, à cause des problèmes de santé avec 2 pères en congé et 2 à la retraite, il n'y a plus en dehors de Tahiti même que 2 prêtres dans les autres îles de l'archidiocèse.
Alors qu'en est-il de l'archidiocèse ? Quels sont les besoins les plus urgents ?
Les îles ? Certainement, il y a un grand vide de présence et de ministres qui demande à être comblé. Tahiti lui-même ? Il y a là de plus grands besoins que dans les îles, même si c'est difficile à croire. La majorité de la population est à Tahiti. Il n'y a pas de développement dans les îles. Les familles nombreuses maintiennent stable la population des îles, mais dès que les enfants grandissent, ils s'en vont pour la vie moderne et... les problèmes offerts par Tahiti. Sur Tahiti même, le baby-boom continue. Plus de la moitié de la population a moins de 25 ans. Les centaines de catholiques des îles ne peuvent se comparer avec les milliers de Tahiti.
L'archevêque nous a demandé notre point de vue et nos choix pour un ministère futur. Il a également envoyé un questionnaire à ce sujet aux prêtres et aux religieux/ses. La participation fut excellente. Finalement, il y a eu une réunion pour discuter de notre engagement pastoral. De notre côté, nous restons en contact avec notre Conseil provincial aux E.U. Le presbyterium du 15 juin n'a pas abouti à une conclusion. Une deuxième rencontre, six jours plus tard, réunissant l'évêque, des représentants du presbyterium et nous trois Oblats, permit d'aboutir à un consensus.
D'abord l'espoir de prendre en charge un secteur des Tuamotu a été, au moins temporairement, mis en suspens. Les besoins de Tahiti sont trop grands. Si d'autres Oblats venaient se joindre à nous, nous pourrions alors envisager le ministère des îles. Dans le même temps, l'archidiocèse recherche des solutions nouvelles et plus créatives.
Quels choix restent-il ? Il nous a été proposé soit la paroisse de Faaa, soit celle de Mahina et la direction du Foyer Jean XXIII et du service des vocations. Il a été décidé que je reste en charge du Foyer et du service diocésain des vocations. P. Jules et P. Patrice iraient à Faaa ou Mahina.
Faaa est la plus grosse paroisse de l'archidiocèse. En 10 ans la population de Faaa est passée de 6 000 à 18 000 habitants. Il y aurait de 9 000 à 10 000 catholiques. La paroisse a deux églises qui sont toutes les deux trop petites. Il y a 3 écoles catholiques dont les 1 800 élèves représentent 10% de la population. La paroisse peut être divisée en une trentaine de quartiers. Jusqu'à présent, il n'a pas encore été possible de contacter la majorité des catholiques. La population vient de la partie catholique des Tuamotu et continue de croître. Il y a quelques paroissiens fortunés, mais la vaste majorité est pauvre et déshéritée.
Mahina est une paroisse plus petite, plus facile à administrer. Située en périphérie est de Papeete, elle aussi se développe rapidement. Il y a les deux mêmes extrêmes : richesse et pauvreté ; elle a besoin de nouvelles constructions pour répondre aux besoins croissants.
Mahina offrait une paroisse avec bien des besoins, mais qui ne devraient pas écraser un nouveau groupe. Le cadre lui-même se prête favorablement à l'implantation d'une communauté religieuse. En septembre dernier (1977), l'archevêque avait planifié de nous offrir Mahina comme première mission.
Faaa est très bruyant, à 1/4 de mille de l'aéroport : le bruit 24 heures par jour, pas d'intimité, le terrain est un passage continuel. De l'école qui jouxte le presbytère, élèves et professeurs ont vue plongeante sur les chambres, sans cesse des nuages de poussière flottent dans l'air, quartiers très denses, pas de place pour développer. Mais... Faaa par sa taille a de grands besoins. Quelle paroisse notre Fondateur, Mgr de Mazenod, aurait-il choisi ?
Faaa avait besoin d'une équipe pastorale. L'évêque estime que nous avons prouvé notre capacité à être une telle équipe. Les Oblats se sentent appelés pour les pauvres. Les plus pauvres sont à Faaa. Faaa est une paroisse vraiment tahitienne. Notre connaissance de la langue n'est pas encore parfaite, mais nous continuons à y travailler. Enfin, nous pensons que l'Esprit Saint est avec nous. À l'unanimité il a été décidé de confier à la nouvelle communauté oblate le soin de Faaa et le ministère des vocations ».
[5] Dans cette zone se trouvent les atolls de Mururoa et de Fangataufa, sites des expériences nucléaires menées par la France. Sans une permission spéciale des autorités françaises, les PP. Guy et Nassaney, américains, ne pouvaient accompagner l'évêque ; par contre, parce que français, je n'avais pas besoin de cette autorisation.
[6] Voir le récit de cette tournée dans la revue « Pôles et Tropiques », de février-mars 1978.
[7] Le P. Jules rejoignait l'atoll de Rangiroa aux Tuomatu, à 320 km au nord de Tahiti, qui, à cette époque, comptait environ 1 000 habitants et 2 paroisses. Le P. Daniel s'envolait pour Tubuai, archipel des Australes, à 800 km au sud de Tahiti. Quant au P. Patrice, il allait sur l'atoll de Takapoto, à 720 km au nord-est de Tahiti.
[8] Mot passé dans le langage international : tabou/taboo.
[9] Katekita : homme ou femme, aide ou remplaçant du prêtre pour la vie chrétienne de la communauté.