« LA VIE CHRÉTIENNE EN PAROISSE »
Le Synode de 1973 avait fait réfléchir sur la question « La paroisse, qu'est-ce que c'est ? ». Seize ans après on s'aperçoit, dans la remontée des travaux de la Commission, qu'il y a certainement beaucoup plus de catholiques capables de répondre bien à l'interrogation.
Mais une paroisse, comme du reste tout chrétien, a toujours à s'ajuster sur sa « mission ». C'est cet ajustement qui conduit à rechercher :
1- Comment les sacrements doivent être préparés et donnés ?
Comment préparer les fidèles à mieux comprendre la liturgie et à la mieux préparer et célébrer ? Comment amener les laïcs en union avec le curé, le diacre à découvrir la pastorale paroissiale et à l'organiser et l'améliorer, en une responsabilité partagée ?
Comment faire la différence (lorsqu'on voit agir un katekita ou autre personne investie) entre « aide » et « ministère » ?
Comment accueillir et épauler les jeunes ?
Comment permettre au « Rosaire vivant » (numériquement le groupe le plus important, le plus stable et le plus intégré à la vie paroissiale) de se développer et s'enraciner au cœur de la vie familiale, du quartier et de la paroisse ?
2- Oui la mission nous renvoie à tous ces « Comment » ; elle nous renvoie aussi quelques soient les réponses à une réalité que l'on ne changera pas ; la paroisse est communauté ecclésiale, la plus fondamentale pour l'extension du Royaume et la croissance et la cohésion du Corps du Christ tout entier.
Le « Conseil Pastoral Paroissial » est l'organe essentiel qui permettra à la paroisse de se mettre sans cesse en face de sa mission, et en même temps de devenir le soutien permanent de l'esprit communautaire. Ce Conseil doit être assez fort et plein de compassion pour porter à l'exemple de Simon de Cyrène la Croix en accueillant les crises, les souffrances, les révoltes des uns et des autres. Si le Conseil est avant tout « au service de tous et de toutes, il n'oubliera pas que pour exercer son rôle de Conseil, ses membres doivent veiller à grandir dans la foi, à vivre dans l'Esprit (car son rôle est de discerner), à rassembler enfin ».
3- Enfin la paroisse a une histoire : elle est implantée dans un peuple sur une terre, elle est jeune comme la dernière génération, elle est sage car habitée par le Christ... elle est en pleine pâte humaine et veut y vivre comme un ferment, Elle est reliée à toutes les autres paroisses par la prière, l'observation de la discipline ecclésiale, le va-et-vient continuel des frères et soeurs, et le rattachement à l'évêque, signe visible de l'unité.
Les travaux du Synode ont commencé avant la parution de « Christi fidèles laici », encyclique qui tout au long de son enseignement montre que la paroisse est la première école des laïcs : formation dans la foi à l'insertion communautaire, à la responsabilité.
De plus en plus, la popularité de la paroisse tient au fait que les gens qui y travaillent y prient, s'y rencontrent, y trouvent une communauté devenue indispensable à leur vie d’homme et de disciple de Jésus. Inversement tous ceux et celles qui évitent les multiples sentiers qui conduisent à la paroisse, spécialement les jeunes pensent à tort ou à raison que la paroisse ne pourra pas combler leurs attentes. Que l'on n'oublie jamais, le dimanche en particulier le grand chapiteau invisible qui abrite cette multitude de nos frères qui n'ont plus faim de Dieu, chez qui les sacrements semblent ne plus agir qui n'imaginent plus qu'il y ait un sacrement de l'amour, ou qui ont dérivé dans les multiples sectes !
La paroisse n'est certainement pas en question en Polynésie, bien au contraire ! Mais la Commission désire que la paroisse elle-même se questionne, non pour la contestation, mais pour un examen de conversion.
Peut-on tenter une description de la paroisse ?
« Une communauté océanique vibrante de ses traditions chrétiennes et polynésiennes vivant de l'Eucharistie, garante de toutes les autres petites communautés de vie, comme la famille, aux écoutes des appels de ceux et celles qui vivent sur les flots lointains de leur détresse prête à prendre le large ou à rester sur le lagon, pour que la parole de vie ne manque à personne jusqu'à son entrée dans le Royaume et que tout homme y trouve paix, vérité et les signes qui lui permettent de s'adresser à Dieu ou de découvrir que Dieu s'adresse à lui. Une communauté qui prie et désire faire l'Eucharistie, continuer sa mission en ses nouveaux prêtres ».
Communauté océanique : paroisse des atolls, des îles de Tahiti, urbaines ou rurales, il y a un air océanique partout qui subsiste.
Vibrante de ses traditions... toute amuira vit de coutumes chrétiennes (chants) que l'on respecte. Elles sont aussi polynésiennes. Le fond de nos paroisses est partout polynésien, l'élément le plus actif, le plus nombreux est polynésien.
Vivant de l'Eucharistie : présence du Christ, communion au Christ et par le Christ, communion aux frères et sœurs. Pain partagé dans le sacrifice.
Garante de toutes les autres communautés : la paroisse fortifie l'esprit communautaire et en rappelle constamment l'absolue nécessité (famille).
Appels... la paroisse n'est pas champ clos... les plus lointains sont entendus.
Parole de vie... la Polynésie, pays biblique se doit de transmettre une parole vivante.
Entrée du Royaume... préparons les « turamaraa » du ciel. Paix, vérité, signes... la paroisse a ses richesses propres qui répondent aux attentes humaines et religieuses de nos frères.
Eucharistie... dans ses nouveaux prêtres : la paroisse ne fait pas que de se nourrir du pain vivant, elle fabrique ce pain vivant, lorsqu'elle permet à de nouvelles vocations sacerdotales d'éclore et d'aboutir.
À mon sens, « Vie chrétienne en paroisse » est la Commission qui se propose de faire vivre à chaque fidèle et chaque famille leur vie et leur mission chrétiennes, à la fois dans l'Église universelle et dans l'Église locale. C'est dans la paroisse principalement que l'on vit l'Église universelle et l'Église locale, car la paroisse est la « communauté » qui se crée pour la mission.
On note, dans les limites géographiques et sociologiques d'une paroisse :
- des forces centrifuges : l'incroyance, l'évasion matérialiste, les contraintes scolaires, professionnelles, les jeunes enquêtes d’un monde nouveau et d'un ciel nouveau, les divisions, le poids d’une tradition mal renouvelée, l'homme blessé dans sa conscience religieuse, les sectes, les fractionnements religieux, etc...
- des forces centripètes : le vide religieux de la société de consommation pousse à retrouver un centre de prière, de vie spirituelle, le besoin communautaire, le lien des générations, le recours des familles qui veulent donner une éducation et une instruction chrétiennes à leurs enfants... et surtout foi chrétienne et communauté primitive vont de pair (la paroisse, c'est la communauté primitive en 1989).
Normalement, la paroisse qui vit l'universel et le local doit pouvoir équilibrer les rencontres culturelles et l'approfondissement culturel dans la prière, l'enseignement religieux, la vie communautaire.
La paroisse « évangélisatrice » forme nécessairement ses membres. De même que la famille forme à l'esprit de famille, la paroisse forme à la mission, car elle est mission. Mais il ne suffit pas d'être tournée vers les autres, et par la force des choses vers l'extérieur, il faut que la paroisse vive en son Centre qui est Jésus-Christ Eucharistie, prière, offrande, unité. L'Eucharistie oblige la communauté missionnaire à pratiquer l'accueil... Jésus dirige nos frères les hommes vers la communauté : il faut le croire et le vivre.
En résumé, paroisse « cascade d'eau fraîche », créant la communauté, des personnes qui cherchent en Jésus la même vie, rassemblant et formant les disciples à la mission, et mémoire qui s'inscrit dans l'histoire des hommes et de l'île.
Que chaque paroisse sache finalement qu'en dernier ressort, un jour proche ou lointain, elle ne pourra se renouveler que dans ses prêtres.