Grandes Figures d’Évangélisation dans le Pacifique
LES APÔTRES DE L’ILE DE PÂQUES
Frère Eugène-Joseph Eyraud ( ?-1868)
Katekita Nicolas Pakarati (1837( ?)-1927)
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Il y a près d’un siècle er demi qu’Eugène Eyraud débarquait à Rapa Nui, plus connue sous le nom de l’Ile de Pâques, nom qu’elle reçut du hollandais Otto de Roggewen qui la découvrit le jour de Pâques 1722.
L’histoire des débuts de la vie chrétienne chez les Pascuans est très particulière et fait apparaître la solide et durable influence des deux apôtres qui n’étaient pas prêtres, le Frère Eugène-Joseph Eyraud et le cathéchiste Nicolas Pakarati.
Rapa Nui constituait l’extrême pointe Sud-Est du Vicariat apostolique d’Océanie orientale. Elle est une des rares îles isolées de l’Océanie. Elle a la forme d’un triangle aux angles fort estompés, points principaux des puissantes poussées volcaniques qui déversèrent leur lave au-dessus des ilôts. La jonction des coulées de roches, de scories et des retombées de cendres constituèrent le grand môle tourmenté qu’est Rapa Nui.
À 4 000 km de Papeete et à 3 800 des côtes chiliennes, cette île vivait isolée et renfermée sur elle-même dans la crainte des actions des bateaux-pirates et dans une décadence notable de sa vie interne. En effet, elle comptait plus de 4 000 habitants avant les razzias effectuées par les négriers du Pérou, dans les années 1860. Plus de huit cents avaient été enlevés et vendus à Callao où presque tous avaient péri de mauvais traitements et de chagrin. Seuls quinze étaient revenus.
Premier contact missionnaire
C’est un laic, Eugène Eyraud, qui le premier apporta la foi à Rapa Nui. De nombreuses circonstances inhabituelles amenèrent cet apôtre remarquabe de son Dauphiné natal jusqu’à l’île de Pâques, en passant par le Chili. Dieu avait préparé et éprouvé longuement sa vocation car il lui réservait une tâche peu ordinaire et remplie d’embûches.
Eugène Eyraud s’était toujours montré profondément religieux, et animé d’un grand zèle apostolique. Arrivé à Papeete en 1863, il avait fait quelques préparatifs, se munissant d’outils et de matériaux pour une première installation sommaire à l’île de Pâques. Il avit également emporté une cloche, un catéchisme et des livres de prières en langue tahitienne. Sans bruit, sans apparat, sans armes ni protection, sans même la consécration du sacerdoce, mais avec une flamme incomparable, un laic décidé allait conquérir cette terre au Christ.
Il s’embarqua pour l’inconnu et la très grande avanture que la goélette La Suerte. Un chrétien mangarévien, Daniel et quelques autres natifs de Pâques l’accompagnaient.
Quand La Suerte se présenta le 2 janvier 1864 devant Hangaroa, la principale agglomération de l’île, l’accueil fut terrible. Il fut celui d’un tumulte indescriptible de gens menaçants et d’aspect féroce… Daniel, à cette vue, prit la résolution de rester sur La Suerte et le capitaine pressa Eugène Eyraud de surseoir à son débarquement, car c’était aller à la mort et quelle mort ! Mais le véritable apôtre qu’il était ne l’entendit pas ainsi et, dominant sa peur, il décida de rester parmi les terribles Pascuans tandis que La Suerte disparaissiat à l’horizon.
Il eut le temps et le bonheur, avant d’être complètement pillé et dépouillé de ses maigres bagages, de pouvoir monter une petite maison préfabriquée qu’il avait apportée de Tahiti. Elle était fort simple cette cabane, mais c’était la première étape de la Mission.
Un pénible charivari à coups de cailloux sur cette pauvre, mais assez solide habitation commença, véritable supplice de la cloche chinoise. Par malheur, il avait établi son habitacle sur un tertre « Apina », appartenant à un certain Torometi qui se comporta comme le maître absolu du nouvel arrivant et de ses quelques biens. Eugène devint son véritable esclave mais, dit-il, y gagna sa pitance journalière, des patates cuites, que lui apportait Torometi.
Au moment du débarquement d’Eugène Eyraud, le 3 janvier 1864, il y avait environ mille deux cents habitants dans l’île, et les curieux, les maraudeurs, les mal-intentionnés ne manquaient pas. Cependant son attitude frappait de jour en jour. Il différait de ces autres étrangers qui opéraint des razzias. Trois fois par jour, la cloche sonnait à Apina et, à l’aide des livres tahitiens, des leçons-prises-de-contact purent s’établir… les soi-disants élèves, fiers ou ingénus, sympathiques ou méfiants, inconstants, parfois narquois et méchants, allaient et venaient autour de lui. Ils ne portaient pas grande attention aux efforts d’Eugène qui, lui-même, ne conaaissait que très peu le Tahitien et pas du tout le Pascuan.. Il apprenait péniblement à s’exprimer tout en enseignant. Tout cela était ponctué par des tracasseries quasi-continuelles, surtout de la part de Torometi.
Harcelé à tout instant, constatant jour après jour, impuissant, de nouveaux pillages danss es pauvres affaires, soumis au même régime insipide et invariable de patates douces, comment cet apôtre pouvait-il espérer quelques transformation ?
Inlassablement il continuait à enseigner. Même réduit au plus grand dénuement, il ne se découageait pas. Ainsi son labeur patient, son esprit surnaturel et l’aide de l’Esprit Saint stabilisaient peu à peu les natures farouches des Rapa Nui et il obtint quelques résultats au boit de plusieurs mois. On apprenanit le signae de la Croix, des prières, des bribes de doctrine, mais surtout des liens de confiance s’établissaient entre le maître et les élèves.
Dautre part, il fut bien sûr intrigué par les Moai, ces immenses statues de pierre et par les tablettes parlantes, ces planches recouvertes d’une authentiqie écriture qu’il découvrait sur l’île.
Neuf mois durant, Eugène Eyraud supporta vaillamment cette vie de privations et dinsécurité.
Préparation d’une deuxième évangélisation.
Le dimanche 10 octobre 1864, la goélette Teresa Ramos jetait l’ancre à Hangaroa avce, à son bord, le Père Barnabé Castan et le Frère Hugues Delpech qui venaient prendre des nouvelles. Avant même que la goélette ne soit au mouillage, des maoris grimpèrent à bord. Une femme arriva la première. L’île n’avait jamais vu de prêtre, mais elle s’adressa tout d’abord au P. Barnabé. En guise de salut, elle fit le signe de la croix et récita le Notre Père, le Je vous salue Marie, et le Je cris en Dieu. Ceux qui la suivaient s’empréssèrent d’en faire autant. Surpris, le Père demanda alors : « Qui vous as enseigné des paroles si belles et si bonnes ? – le paapaa ! » répondirent-ils d’une seule voix.
Eugène Eyraud rendit compte de ses mois de mission héroïque. Le Père n’eut pas trop de peine à le persuader que, dans l’intérête même de l’Église, son retour à Valparaiso s’imposait pour préparer une véritable mission à l’ile de Pâques. Il s’embarqua donc, mais ce fut le cœur serré qu’il vit disparaître à l’horizon la terre où il venait de passer neuf mois.
Attiré par l’œuvre missionnaire de l’Église, il consacra sa vie à Dieu en entrant comme Frère convers dans la Congrégation des Sacrés-Cœurs établie au Chili et qui avait également la charge du Vicariat Apostolique de Tahiti. Il fit profession religieuse le 6 mai 1865 sous le nom de Frère Joseph.
Conaissant bien les besoins de l’île de Pâques, le Frère Eugène-Joseph Eyraud fut d’un très grand secours à Valparaiso pour faire les préparatif d’une mission plus sérieuse.
Le retour à rapa Nui se fit encore par tahiti. Le Père Hippolyte Roussel, présent en Océanie depuis 1854 et qui était missionnaire aux Tuamotu-Gambiers, connaissant bien le Maori, fut nommé par Mgr Jaussen pour aller sur l’île de Pâques avce le Frère Eyraud.
Ils quittèrent Papeete au début de 1866 sur le deux-mâts Notre-Dame de Paix. En passant aux Gambiers, trois Mangaréviens : Arari, Aeraki et papetati, chrétiens érouvés montèrent à bord et accompagnèrent les missionnaires.
Le Notre-Dame e paix toucha Hangaroa le 23 mars 1866. Le Père Roussel, homme d’un grand calme, ne se laissa pas troubler par le vacarme des Pascuans qui s’excitaient au bord de mer. Il mit pied à terre et, du haut d’un « ahu » (monument pascuan) il prononça une harangue en maori. Stupéfaits, les Pascuans écoutèrnt ce discours inattendu, mais qu’ils comprenaient en grande partie.
Tout se développe bien
Le déchargement s’effcetua sans trop de peine. L’installation à Rapa Nui se fit à force de patience et, grâce à l’expérience du Frère Eyraud, dans de meilleures conditions que la première fois. Le Frère Joseph-Eugène et les trois mangaréviens prirent le marteau et la scie et bientôt deux habitations furent sur pied. Ils s’occupèrent de jardinage, confiant à la terre pascuane des semences de Tahiti. Peu à peu, l’installation matéreille se concrétisait. Tandis que le P. Roussel visitait les malades, baptisait les mourants et enseignait, les âmes s’ouvraient à l’Évangile. Combien d’avanies, malgré tout, eut encore à supporter la vaillante équipe missionnaire !
Peu à peu, néanmoins, une trnasformatio s’amorça parmi les habitants de Rapa Nui et, si on ne baptisait pas encore, sauf les mourants, la grâce de Dieu faisiat son œuvre dans les cœurs.
Sept mois passèrent et un renfort arriva de Valparaiso le 7 novembre 1866 sur le Tampico : le Père Gaspard Zumbohm et le Frère Théodule Escolan débarquèrent du navire. La réception à Hangaroa fut meilleure : du travail avait été fait sur les esprits. Le capitaine Dutrou-Bornier, du Tampico, fit des éloges admirables sur le travail déjà accompli par les missionnaires. Les regroupements dans la chapelle avec chants et prières, l’avaient frappé.
Les quatres missionnaires, aid »s des Mangaréviens, travaillaient avce méthode. Des édifices pour le culte prenaient de l’importance, les malades étaient visités et soignés selon le smoyens, deux centres furent créés pour venir au secours des nombreux orphelins et orphelines dont les pères avaient péri par l’effet des razzias péruviennes. L’œuvre de charité était exercée à Pâques.
Le travail dans les esprits se poursuivait, avce des échecs et des remontées de l’instinct sauvage. Cependant la patience des missionnaires et le bon exemple des chrétiens mangaréviens ne se laissaient pas prendre en défaut.
Des baptêmes de moribonds, on passa à ceux de certains enfants dont les dispositions étaient satisfaisantes. L’instruction, et surtout l’éducation, parmi les adultes si indisciplinés avant, avançaient lentement et, en 1868 déjà, les Pères baptisèrent plusieurs groupes importants d’adultes. La première célébration de baptême pour trois cent quatre-vingt catéchumènes eut lieu le 14 février et ainsi toute l’année à Pâques, à la Pentecôte, à la fête du Sacré-Cœur, s’échelonnèrent de nombreuses entrées dans l’Église.
Le passage d’un bateua où se trouvait le Père Eich, futur évêque de Tahiti, porta le dernier coup au paganisme et une grande cérémonie de baptême fut fixée au 14 août, veille de l’Assomption de Marie.
Mgr Jaussen, intrigué par la langue et les tablettes parlantes de Rapa Nui, demanda au P. Roussel de sauver du feu les derniers exemplaires : cinq furent ainsi sauvegardés. Plus tard, avce l’aide de Metoro Tauaura, travailleur dans une plantation, Mgr Tepano essaya de déchiffrer ces hieroglyphes : « Je mis une tablette entre les mains de Metoro. Il la tourne, la retourne, cherhce le commencement du récit et se met à chanter… C’est une écriture boustrophédon allant comme les sillons d’un champs » écrit l’évêque en février 1877 dans son mémoire à l’Académie de Paris.
Mort du premier apôtre
Mais, parallèlement à ce côté encourageant, il y avait l’envers de la médialle. Plusiers sortes de microbes avaient été introduits dans l’île par les quelques quinze rescapés revenus des mines du pérou et faisaient de mortels ravages parmi la population sans grandes défenses sanitaires. La population diminuait rapidement et devant les conditions très précaires de l’habitat, les missionnaires étaient impuissants.
Le Frère Joseph-Eugène Eyraud lui-même, affaibli par son premier séjour et par son travail incessantn fut atteint d’une toux opiniâtre qui l’oppressait. Dès 1867, il dut cesser presque toutes ses activités. Après une légère amélioration de sa santé, le mal reprit et il dut s’aliter le 12 août 1868.
Le 18, son dernier souci fut de demander si tous ses fils étaient baptisés. « Presque tous, lui fut-il répondu, seul un dernier groupe qui reste se présentera aux fonts baptismaux en octobre ». Un dernier rayon de joie illumina le visage d el’apôtre mourant.
Le 19 août 1868, à 23h, le fondateur de la Mission de Rapa Nui regagnait la maison du Père. Son œuvre sur terre était terminée.