BLANC Eutrope (Fr Michel, s.s.c.c.)
BLANC, Eutrope (Frère Michel) 1832-1899. – Religieux picpucien. Né le 15 mars 1832 à Rochefort (Charente-Maritime). Charpentier de métier, ayant fait profession, comme frère convers, dans la congrégation, le 22 juin 1863, il reçoit trois ans plus tard son obédience pour les îles Marquises. Il y passera toute sa vie, construisant de nombreux édifices pour la mission. « Si on retranchait aux Marquises ce que cet habile et courageux ouvrier a construit, il resterait peu de choses remarquables », écrira de lui Mgr Martin. On lui doit en particulier l’érection d’une rustique statue monumentale de la Vierge qu’il s’en fut installer sur un pic inaccessible qui domine la mer, le mont Heu, à Hatiheu, sur la côte nord de Nuku Hiva. C’est également là qu’il édifia, en 1874, l’église d’Hatiheu longue de plus de 32 m dont les décorations impressionnèrent vivement les indigènes. Robert Louis Stevenson, qui visita les Marquises en 1888, décrit l’église du Frère Michel « en pierre, avec ses tours jumelles, des murailles soutenues par des arcs-boutants et une façade sculptée. Le dessin… est bon, simple et pur de forme. Mais tout le caractère est dans les détails où l’architecte s’est métamorphosé en sculpteur. Il n’y a pas de mots pour décrire les anges qui montent la garde autour du portail, et les chérubins dans les coins, et les gargouilles représentant le bouc émissaire, et le haut-relief bizarre et plein de vie où saint Michel, le patron de l’artiste, met à mal Lucifer, qui proteste… Nous ne nous lassions pas de contempler cette imagerie si naïve, si amusante, et pourtant si artistique, dans le meilleur sens du mot, dans le sens de l’invention, du goût, de l’expression ». Et, dans le 10e chapitre de la partie consacrée aux Marquises de son livre In the South Seas, l’écrivain anglais a consacré au Frère Michel Blanc « frère lai français, qui tire sûrement son origine de quelque maître-maçon de l’âge des cathédrales » et « modèle accompli du missionnaire » quelques pages pleines de sympathie et un portait pittoresque qui font entrer, par la plus grande porte, dans l’histoire littéraire cet artiste ignorant de ses dons et qui, pauvre et ignoré, a passé « des années et des années dans une cellule de deux mètres carrés, lui qui a construit tant et tant de maisons pour les autres » (Mgr Martin). Le Frère Michel mourut à Atuona (Hiva Oa), le 4 novembre 1899. Il repose au cimetière de la Mission à l’ombre d’une grande croix de 12 m de haut qu’il avait lui-même érigée.
Bibliographie. – Un critique d’art américain, A. V. Frankestein, de San Francisco, s’est intéressé aux travaux de sculpture du Frère : Angels over the altar. Honolulu ; 1961.